Free mobile, une révolution?

Publié le par Flavien

   « The Rocket is on the launch pad », voici ce que l'on pouvait lire sur le Twitter de Free quelques jours avant son arrivée sur le marché de la téléphonie mobile.

 

   Réitérant sa stratégie adoptée lors de son arrivée sur le marché des box internet (où free avait fait considérablement baisser le prix de nos abonnements), la firme s'attaque désormais à un marché saturé, où il risque d'être difficile de se faire une place.

 

   Axé sur deux offres, la politique de Free est claire : proposer les meilleurs forfaits aux meilleurs prix. La société a donc adopté une stratégie de prix prédateurs* qui aura eu raison des trois opérateurs historiques (Orange, SFR et Bouygues Telecom) qui, même s'ils ont essayé de s'aligner, ont perdu près de 560 000 de leurs consommateurs, dont la plupart ont effectué un portage de leur ligne vers Free mobile. Les parts de marché des concurrents de Free ont donc reculé et c'est SFR qui en pâtit le plus, avec un recul de 5 points contre 4 pour Orange et 2,6 pour Bouygues Telecom.

 

   Les estimations convergent autour de 1,5 million d'abonnés pour Free mobile, ce qui représente environ 3% du parc de forfaits mobiles.

 

   Mais il faut être clair : Free est là pour se faire de l'argent, il faut alors pousser les consommateurs à prendre le forfait qui leur est adapté afin d'en tirer le maximum de bénéfices, car, comme tous les opérateurs téléphoniques, Free se trouve en position de sélection adverse : les consommateurs disposent d'informations privées dont Free n'a pas connaissance, la firme n'observe pas bien les caractéristiques, les besoins de ces agents mais, c'est eux qui ont l’initiative quant au choix de leur forfait.

  La solution la plus simple pour pallier à cela est de créer des contrats segmentés afin que les consommateurs se positionnent quant à ceux-ci et révèlent ainsi leurs informations, le but étant de capter le maximum de surplus du consommateur*.

 

   C'est donc ce que Free à fait, outre l'aspect marketing qui révolutionne ce marché de par des prix très faibles, les consommateurs n'ont plus à se perdre dans la multitude d'offres qui leur est proposée et le choix est vite fait : vous êtes un grand consommateur, vous avez un smartphone qui nécessite un forfait data, alors le forfait Free à 19,99€ est fait pour vous. Vous avez peu de revenus, votre consommation est faible, alors tournez vous vers le forfait à deux euros.

 

   Mais comment est-il possible, pour Free, de proposer des tarifs aussi attrayants ?

  C'est très simple, les opérateurs historiques ont gonflé leurs marges et se sont entendus par le passé, ce qui a eu pour effet direct une montée des prix (mais cela leur a, tout de même, valu une douloureuse condamnation s'élevant à 500 millions d'euros). Free réduit donc ces marges, qui sont d'ailleurs astronomiques, pour proposer des prix plus bas.

  Xavier Niel, actuel PDG de la firme, ajoute à cela le fait que comme l'entreprise appartient à 70% à des salariés qui y travaillent, la firme peut se permettre de verser des dividendes beaucoup plus faibles que ceux des autres opérateurs, qui sont des entreprises de marché, dont les actionnaires réclament de forts dividendes.

  Il s'agit donc d'un véritable atout stratégique autant pour l'investissement (car 50% du chiffre d'affaires réalisé par la firme est directement réinvestit dans ses réseaux, chaque année) que pour le niveau des prix que l'entreprise peut proposer. Ajoutons à cela que Free ne dispose que de 6 boutiques physiques en France, la firme ne supporte donc que très peu de coûts liés à celles-ci .

 

   Free peut également compter sur la force de sa communauté, celle des « freenautes » qui regroupe un grand nombre de fans de la firme. Elle propose donc une réduction du prix de ses forfaits de l'ordre de 4€ pour le forfait Free et rend gratuit son forfait à 2€ (dans la limite d'une personne par foyer) pour tous ses abonnés.

 

   Il faut toutefois relever un point qui peut être considéré à la fois comme une force et comme une faiblesse : Free renforce la liberté du choix des consommateurs en rendant le forfait et le téléphone indépendant l'un de l'autre. La firme ne subventionne pas les terminaux comme le font ses concurrents : au prix du forfait, se verra donc ajouter celui du téléphone, que l'on pourra payer, en entier, tout de suite ou étaler le paiement sur 12, 24 ou 36 mois. On peut ainsi très facilement voir notre forfait à 19.99€ passer à 30 voire 40€ par mois selon le téléphone choisi et le mode de paiement.

  Nous sommes alors en droit de nous demander si ces offres valent réellement le coup, car il est vrai que les autres opérateurs, malgré une baisse de leurs prix, ont des offres dont le prix reste supérieur à ceux de Free.  

  Toutefois, ces offres, pour la plupart, comprennent un subventionnement de votre téléphone, qui vous coutera moins cher à l'achat.

 

Prenons le cas d'un Galaxy S II acheté chez Orange et chez Free avec un engagement de 24 mois:

 

 

Téléphone

Forfait

Total sur 24 mois

Orange

249,00 €

36€/mois

1 113€ soit 46,375€/mois

Free

479 € soit 19,95€/mois

19.99€/mois

958,76€ soit 39,94€/mois

 

   Dans notre exemple, nous devrons ainsi payer : soit 249€ lors de l'achat de notre téléphone puis 36€ par mois chez orange; soit payer 39,94€ par mois chez Free.

 

   Reste donc à faire un choix.

  Personnellement, je pense que les offres de Free sont très bien si vous avez déjà votre téléphone et que vous ne souhaitez pas en changer. Si ce n'est pas le cas, il ne faut pas foncer tête baissée chez Free et regarder ce que propose les concurrents. Après tout, il s'agit là aussi d'un des objectifs de Free mobile : relancer la concurrence sur un marché saturé et rigide depuis des années.

 

   Free aura subit quelques problèmes de mise en place (difficulté du portage des numéros, dysfonctionnement de certaines lignes, etc.) mais la firme semble bien lancée. Il est surement encore trop tôt pour voir si Free aura véritablement chamboulé le marché, car beaucoup de consommateurs sont encore sous engagements chez ses concurrents. Il faudra encore attendre une année ou deux avant d'en percevoir les réels effets, bien qu'on puisse déjà se rendre compte des bénéfices liés à cette entrée sur le marché d'un quatrième opérateur.

 

 

 

 

 

(*) Une stratégie de prédation réside dans la pratique de prix bas qui ont pour but d'évincer la concurrence (ou de s'en protéger) et d'étendre ses parts de marché.

 

 

 

(**) Dupuit introduit le fait que des agents soient prêts à payer plus pour un bien que son prix réel (du fait de l'information imparfaite), la différence entre le prix que l'agent serait prêt à payer et le prix effectif du bien ou du service sur le marché constitue le surplus du consommateur.

 

 

 

 

Publié dans Entreprises

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