Renégociation de la dette grecque. Pourquoi ? Comment ? Et pour qui ?

Publié le par Arnaud

   La dette grecque représente 159,1% du PIB au troisième trimestre 2011. C'est le pays qui possède le plus gros endettement relatif au PIB de la Zone Euro. Il est estimé à 160% pour le premier trimestre 2012.

 

 

   Qui détient cette dette ?

 

   Le secteur privé (banque, assurance, fond d'investissement...) est engagé à hauteur de 210 milliards d'euros, soit 58,3% du montant total.

   Les 41,7% restants sont détenus par les institutions publiques nationales et internationales. Les différents pays de l'Union Européenne et le FMI (Fond Monétaire International) en détiennent 76 milliards d'euros (21,1%), la BCE (Banque Centrale Européenne) possède entre 44 et 50 milliards d'euros (entre 12,2% et 15,2%) et, quant aux 30 milliards restants (8,3%), ils appartiennent à différents fonds souverains et banques centrales.

 

 

   En quoi consiste l'échange de dette grecque ?

 

   Le but est d'effacer une partie de sa dette publique.

   Pour cela, les détenteurs d'obligations grecques échangeront leurs titres actuels contre des nouveaux moyennant une décote de 53% de la valeur nominale.

   Un agent détenant une obligation achetée à 100€ l'échangera contre une nouvelle obligation d'une valeur de 47€.

 

   La réalité est plus complexe. L'échange des anciennes obligations se fera contre deux titres de créances, avec d'une part, de nouvelles obligations grecques à hauteur de 31,5% du nominal des titres présentés et, d'autre part, des obligations garanties par le FESF (Fond Européen de Stabilité Financière) pour les 15,5% restants.

 

 

   Quelles sont les conditions de participation à l'échange ?

 

   Le gouvernement grec a posé un seuil minimum de participation de 75%. En dessous de ce seuil, l'opération n'aura pas lieu, ce qui mettra le pays en défaut de payement, c'est-à-dire dans l'incapacité d'honorer ses créances. Au dessus de 75%, l'Etat grec pourra obliger les détenteurs d'obligations de droit grec à participer à l'opération en actionnant des clauses d'actions collectives.

   Seuls les créanciers privés (banques, assurance, fonds d'investissement...), qui détiennent des obligations, peuvent participer à cette opération.

 

 

   Premier résultat de l'opération :

 

   Vendredi 9 mars 2012, les premiers résultats concernant l'échange ont été dévoilés.

   La participation des créanciers privés a atteint 83,5% représentant un volume d'échange de 85,8%. Le déclenchement de clauses d'actions collectives devrait porter ce résultat à un peu plus de 95% en valeur.

   Cet échange permettra d'effacer environ 107 milliards d'euros, sur un total de 360 milliards d'euros de dette publique grecque (rappel : Les créanciers privés détiennent 210 milliards d'euros de dette) et ainsi ramener son déficit public à 120% du PIB en 2020, contre 160% actuellement.

 

 

   Plusieurs points sont à souligner :

 

   - Tout d'abord, la valeur des nouvelles obligations émises risque de chuter sur le marché secondaire (marché d'occasion où les agents peuvent acheter et vendre les titres émis précédemment). En effet, les nouvelles obligations auront un taux d'intérêt très faible, de l'ordre de 2%. Le rendement qui est censé refléter le risque de l'investissement (règle élémentaire de la finance), n'est pas du tout à son juste niveau.

    Prenons une obligation quelconque émise à une valeur nominale de 100€ et un rendement annuel de 5%, soit 5€ par an. Si le marché estime que le rendement n'est pas assez élevé pour le risque encouru, le cours de l'obligation diminue (effet de l'offre et de la demande sur le titre).

    Par exemple, le prix de l'obligation est tombé à 50€. Un investisseur qui déciderait de l'acheter aurait un rendement de 5/50=0,1 soit 10%, et donc pour un investissement de 100€ il recevra 10€.

   Ce mécanisme permet d'augmenter le taux de rendement et ainsi de le corréler au risque envisagé.

 

 

   - L'activation de la clause d'actions collectives aura un effet coercitif. Elle va obliger les détenteurs de dettes à procéder à l'échange, ce qui constitue un événement de crédit et entraîne le déclenchement des CDS, et donc des pertes pour les établissements financiers qui avaient émis ces contrats. L'ISDA, l'organisme international qui supervise les produits dérivés, dont les CDS, estime à 1,5 milliard d'euros le montant des remboursements.

 

 

   - Si l'Europe avait agi plus rapidement, la facture aurait sans doute été moins lourde. Georges Ugeux (Président de Galileo Global Advisors et banquier d'affaires) estime que « cet attentisme a un prix de plus de 100 milliards d'euros ».

 

 

   - Avec un chômage dépassant les 20% et une croissance négative, la Grèce n'est pas pour autant sortie d'affaire. Les mesures mises en place par le gouvernement plombent le redémarrage de l'économie grecque. La pression fiscale étouffe les ménages les plus modestes alors que les plus riches expatrient leurs patrimoines pour éviter l'impôt, diminuant les recettes fiscales et creusant encore plus le déficit public.

Publié dans Finance

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